Le socialisme n'est pas réductible au père Marx, selon Duprat. Publié par voxnr.fr le 24/09/23.
Le bon socialisme selon François Duprat
François Duprat aurait-il été l’émule d’Olivier Faure, patron du Parti socialiste, s’il n’avait pas été fauché dans un attentat à la bombe ? C’est plus que douteux, puisque Faure n’est pas un adversaire de la « démoploutocratie », ni un lecteur de Drieu la Rochelle, contrairement à Duprat.
Néanmoins, il faut rappeler à nos contemporains, et en particulier aux militants, que les idées socialistes n’ont que peu à voir avec la triste caricature qu’offrent les idées du parti dit socialiste actuel. Le socialisme est un univers extrêmement vaste où sont regroupés des idées et des théoriciens aux idées souvent radicales, et parfois impossibles à concilier, et qui tous se réclament d’un idéal d’harmonie sociale, et parfois nationale.
C’est justement dans cette veine à la fois sociale et nationale que Duprat est classable. En effet, celui-ci a défendu, essentiellement dans les cahiers européens mensuels (aux numéros 6, 8, publiés respectivement en février et avril 1977, dans les articles Socialisme et nation et Le vrai socialisme) les positions et éclaircissements qu’il jugeait nécessaires.
François Duprat n’a pas développé de doctrine économique bien précise, et il est vain de la chercher dans ses écrits. En réalité, l’auteur de l’article « Le vrai socialisme » cherche d’abord à exprimer une vision du monde, des idées clés, un socle capable de rassembler des militants. N’oublions pas aussi que Duprat, alors « main dans la main » avec Jean-Marie le Pen au Front National, doit manifestement prendre garde à ne pas passer pour un extrémiste aux yeux des conservateurs de ce parti national-populiste, choix électoraliste oblige.
Rappelant la distinction à faire entre capitalisme et propriété, il écrit :
« Le capitalisme n’a rien à voir avec une propriété privée qui préexistait très largement. Il est un système de production et d’échange, et non pas une sorte de palladium de la propriété privée. Celle-ci, dans ce qu’elle a de juste et de sain, en tant que fruit de l’effort et de l’épargne, est d’ailleurs réduite rapidement à un rôle subalterne par le développement d’un hyper-capitalisme, qui tend toujours à concentrer les richesses produites. »
A une époque où un marxisme verbalement intransigeant demeurait puissant dans la politique hexagonale, il écrit :
« Quant au socialisme, ce n’est que dans l’acceptation marxiste du terme qu’il peut être tenu pour synonyme de collectivisation. »
S’auto-classant au sein du socialisme dit français, il précise à ce sujet :
« L’école socialiste française ne l’a jamais envisagé sous cette forme, ce qui explique que les nationalistes (Barrès le plus souvent, mais Maurras aussi), aient souvent fait référence au socialisme à la fin du XIXe siècle et au début du XXe siècle. »
Il est dommage que le grand pourfendeur du « sionisme » n’ait pas davantage développé ce qu’il entendait par « école socialiste française », car son affirmation n’est pas tout à fait exacte si l’expression est prise au sens le plus large. Des héros comme Babeuf ou Blanqui, collectivistes non-marxistes, appartiennent à l’histoire du socialisme de France, ce qui infirmerait le propos de Duprat. D’autant que celui-ci a précisé dans un autre propos que les NR réclament « un socialisme nationaliste, directement issu de Fourier, de Tridon, de Lassalle (…) ». Or, Tridon, disciple de Blanqui, tout comme Lassalle, ont un idéal communisant. Comme Duprat l’indique le terme de « révolutionnaire » de l’acronyme NR signifie « marquer notre opposition radicale à tout compromis avec les fores du régime (conservatisme, libéralo-capitalisme, sionisme). »
De plus, il n’y a pas de lutte des classes souhaitable chez Duprat, et au contraire le souhait de la voir disparaitre. Non pour sauver les banques, mais plutôt pour sauvegarder les PME et les « travailleurs », c’est-à-dire les authentiques producteurs de richesse de la prédation capitaliste, contre « ceux qui les exploitent et qui se servent de la nation pour la réalisation d’une politique d’asservissement du peuple. », et contre « l’exploitation de certaines sources sociales par tous les groupes parasitaires qui infestent notre société. »
Il faut bien sûr comprendre que, parmi ces groupes, celui du « sionisme international », pour reprendre les mots mêmes de Duprat, tient une large place.
Contre les maurassiens de son temps, Duprat explique encore : « nous ne croyons pas en un corporatisme surgi d’un passé disparu. »
Défendant l’usage du terme « socialiste », l’historien-militant explique :
« Il a, en fait, fallu la régression droitière et conservatrice du nationalisme pour que le mot de socialisme disparaisse au profit de social, qui avait une connotation archi-conservatrice et paternaliste. »
Sa disposition d’esprit semble claire : « (…) nous ne voulons pas d’un capitalisme assagi. »Par ailleurs, jamais le lien entre nationalisme et esprit social n’est rompu dans sa pensée :
« En réalité, le socialisme nationaliste est la prise de conscience qu’une révolution n’est pas seulement indispensable dans le domaine politique, mais aussi dans le domaine économique et social. Les nationalistes-révolutionnaires ont la claire conscience qu’une communauté nationale n’existe que si la richesse ne donne pas le pouvoir. »
L’impératif national n’est certainement pas nié, puisqu’il écrit que les NR « savent que la possession des moyens de production est liée à la fonction sociale de l’économie, et que le contrôle de la communauté n’est pas une spoliation mais la garantie d’une vie nationale harmonieuse. »
Sa conclusion est sans appel :
« Le capitalisme doit être détruit parce qu’il détruit la communauté populaire nationale, pour le plus grand profit des intérêts apatrides. »
Souhaitant toujours rameuter autour de sa bannière, Duprat insiste pour définir l’étiquette même dont il se réclame :
« En fait, plus que jamais, dans cette période de crise conjointe du capitalisme et du marxisme, la formule de tout nationalisme authentique reste valable : « Si vous aimez votre peuple, vous êtes socialiste, si vous aimez votre nation, vous êtes nationaliste, soyez nationaliste-révolutionnaire pour unir les deux. »
En définitive, François Duprat propose des pistes plus qu’il ne sanctifie un programme net.
Vincent Téma, le 23/09/23.